Publiant leur étude dans Science, des chercheurs américains ont montré expérimentalement que des mouches drosophiles mâles en manque de sexe, contrairement à leurs congénères plus chanceux, montraient une préférence pour les aliments mêlés à de l’alcool. Un constat qui pourrait intéresser les spécialistes des addictions.
Dans l’étude qu’ils ont menée, des biologistes de l’Université du Missouri ont constaté que des mouches drosophiles mâles qui avaient fécondé à plusieurs reprises durant plusieurs jours ne montraient aucune préférence pour les aliments alcoolisés qu’on leur proposait (parmi d’autres). A l'inverse, les mâles ‘rejetés’ n’ayant pas eu accès aux femelles affichaient au contraire une prédilection pour la nourriture mélangée à 15% avec de l’alcool.
Mais ce n'est pas la seule constatation qu'ont fait les chercheurs. Ils ont également observé que les mâles insatisfaits présentaient des taux inférieurs d'une molécule appelée neuropeptide F, contrairement à leurs congénères sexuellement comblés qui eux, montraient des niveaux bien plus élevés. Selon les chercheurs, les comportements des sujets étaient même totalement prévisibles en fonction des niveaux de neuropeptide F dans le cerveau des insectes. Les chercheurs pensent ainsi que l'alcool peut avoir satisfait le désir de récompense physique chez ces insectes.
"L'identification des mécanismes moléculaires et génétiques qui contrôlent la demande de récompense chez les mouches drosophiles pourrait influencer notre compréhension de l'abus de drogues et d'alcool chez les humains, puisque des études antérieures ont détaillé les similitudes entre les voies empruntées par les signaux [sensoriels] chez ces mouches et chez les mammifères. Les auteurs fournissent de nouveaux aperçus sur un circuit neuronal qui relie une interaction sociale gratifiante avec un changement durable de préférence comportementale", a commenté Troy Zars, professeur agrégé de sciences biologiques à l'Université du Missouri et expert en neurobiologie.
De nouvelles thérapies contre l'addiction ?
En effet, un neurotransmetteur cérébral semblable au neuropeptide F existe chez l'humain, il s'agit du neuropeptide Y, ce qui pourrait ouvrir la voie à de nouveaux traitements contre la dépendance à l'alcool ou à d'autres drogues, juge Ulrike Heberlein, professeur d'anatomie et de neurologie à l'Université de Californie à San Francisco et principal auteur de ces travaux cité par l'AFP. Celle-ci précise également : "si les neuropeptides Y s'avèrent bien jouer un rôle déterminant dans l'état psychologique conduisant à abuser de l'alcool et des drogues, on pourrait alors mettre au point des thérapies neutralisant les récepteurs de cette molécule" pour en assurer un niveau suffisant constant dans le cerveau.
Néanmoins, des essais cliniques sont déjà en cours pour évaluer les effets du neuropeptide Y et notamment sa capacité à soulager l'anxiété et d'autres troubles psychologiques aussi bien que l'obésité.