Notre pays, ses épargnants, ses entrepreneurs, sa société civile et ses institutions se sont révélés depuis 15 ans particulièrement capables d'agir de concert pour transformer les comportements financiers et entrepreneuriaux. Les marges de progression demeurent considérables pour multiplier les investisseurs, en améliorer la répartition géographique et démocratiser cette activité.
L’histoire du mouvement des business angels dans notre pays démontre amplement la possibilité de modifier les pratiques des épargnants. Initiée il y 15 ans au sein de catégories sociales favorisées, dans lesquelles l’investissement personnel et direct s’est rapidement développé, cette évolution est en passe de toucher des catégories beaucoup plus larges. Les conséquences de cette dynamique sont susceptibles de contribuer à modifier la relation des Français à l’entreprise et au modèle marchand.
Il importe dans un premier temps de restituer l’historique de ce changement.
Au milieu des années 80, les succès des entreprises américaines et de la Silicon Valey ont conduit les Européens à s’interroger sur les conditions d’émergence des start up outre-Atlantique. Le rôle- clé des business angels a été identifié, notamment dans le rapport « Guillaume », qui préconisait de créer des fonds d’amorçage pour suppléer à ce manque.
Au même moment l’expérience britannique démontrait qu’une certaine forme de volontarisme pouvait permettre de développer en Europe, grâce à la création de réseaux ad hoc, l’activité des business angels.
Copiant ce modèle, que de nombreux sceptiques estimaient inapproprié à nos compatriotes, réputés réticents vis-à-vis du risque entrepreneurial, nous avons créé en 1997, au sein d’un club d’entrepreneurs des Hauts-de-Seine, et avec l’appui de nombreux bénévoles et d’institutions (Région, Département, chambre consulaire) le premier réseau français. Ce réseau, « Investessor », qui existe toujours, a servi de modèle à de nombreux autres. En 2001 nous fondions la fédération, France Angels.
La réalité des réseaux français est maintenant foisonnante, comme l’a montré la récente « Semaine des business angels » : 85 réseaux existent. Les uns sont généralistes. Les autres sont spécialisés, soit vers un domaine d’activité (les biotechs, le développement durable, etc.), soit en raison de spécificités des investisseurs (anciens élèves de telle école, femmes, etc.).
L’étude OCDE "Financing High-Growth Firms - The Role of Angels Investors" publiée récemment, montre que c’est en France que le développement des réseaux et de leur activité a été le plus rapide. En dehors des Etats-Unis c’est dans notre pays qu’il y a le plus de réseaux et que le montant des investissements (pour la partie connue de ceux-ci) est le plus élevé. Pour les 9 premiers mois de 2011, 40 M€ ont déjà été mobilisés vers 310 projets.
France Angels a été conçue à partir d’un pari : la possibilité d’agir sur les comportements. Pour cela elle a mis à disposition de quelques pionniers des instruments de formation et d’animation
qui leur ont permis d’être des prosélytes efficaces. France Angels n’a pas été créée pour défendre les intérêts catégoriels, notamment fiscaux, des investisseurs existants, mais pour agir sur les
comportements, et cet objectif, la fédération l’a atteint.
Une autre caractéristique de ce mouvement a été sa relation avec les pouvoirs publics. De part et d’autre les approches bienveillantes ont prévalu.