On se souvient d’Areva, amené à la faillite par madame Lauvergeon (corps des mines et ancienne sherpa de Mitterrand) après avoir racheté pour 1. 8 milliards d’euros une mine d’uranium au Niger dans laquelle il n’y avait pas la moindre trace d’uranium. On se souvient aussi que celui qui avait présenté cet investissement de qualité à madame Lauvergeon n’était autre que monsieur Fric qui se trouvait être le mari de madame Lauvergeon. L’affaire, qui a eu lieu il y a plus de 10 ans, n’a toujours pas été jugée ce qui rappelle que la justice n’est pas toujours aussi rapide qu’elle le fût avec monsieur Fillon.
En ce qui concerne Alsthom, celui qui était à la manœuvre pour démanteler le groupe français et transférer à General Electric toute la technologie française des turbines nucléaires qui équipent non seulement nos centrales mais aussi nos sous-marins nucléaires et le Charles de Gaulle, n’était autre que le jeune Macron, inspecteur des finances, secrétaire général adjoint de l’Elysée puis ministre en charge du dossier, monsieur Montebourg, le précèdent ministre ayant refusé cette vente et ayant été renvoyé du gouvernement par le président Holland pour s’occuper de ses abeilles.
Et maintenant, c’est le tour d’EDF de passer à la trappe.
Mais avant d’expliquer comment messieurs Lemaire et Macron entendent faire disparaitre EDF , je voudrais rappeler qu’EDF c’était la production d’électricité nucléaire , Alsthom, c’était la production et la conception des centrales nucléaires et Areva, c’était la recherche du minerai et la transformation de ce minerai en combustible appelé à servir dans les centrales.
Et donc, début 2000, la France était sans doute le seul pays au monde qui contrôlait l’ensemble de la filière nucléaire, de la recherche de l’uranium à la construction des centrales et à la distribution du courant.
Et tout cela, qui avait commencé avec de Gaulle et Pompidou, devait gêner beaucoup de gens aux USA, au Qatar, en Arabie Saoudite, en Russie, en Allemagne et que sais-je encore.
Il faut reconnaitre que si la capacité de notre pays à développer une indépendance énergétique gênait beaucoup de gens, eh bien voila une gêne qui a disparue, pour eux à tout le moins.
Areva est en état de mort cérébrale, Alsthom a transféré tous ses brevets à General Electric qui les a domiciliés en Suisse (et donc, plus de royalties pour la France), et quant à EDF, elle est en voie de déposer le bilan grâce aux actions combinées de messieurs Macron et Lemaire et aux dispositions prises par la Commission Européenne.
La mort programmée d'EDF
Il me faut donc maintenant essayer de décrire comment la mort programmée d’EDF a été organisée avec la bénédiction de la fonction publique française .
Revenons en arrière, il y a trente ans.
Grace à ses centrales nucléaires et à ses barrages, la France produit plus d’électricité qu’elle n’en consomme et donc les entreprises françaises bénéficient de l’électricité la moins chère d’Europe, ce qui donne un avantage comparatif non négligeable à notre pays par rapport à ses voisins.
Mais EDF est un monopole. Ce monopole, qui n’est pas un monopole privé mais un monopole public, est détenu à 100 % par l’Etat Français et donc in fine par les Français, ce qui est bien normal puisque les investissements , tous les investissements qui ont amené à cette heureuse situation, ont été payés par les impôts des citoyens français.
Hélas, la Commission Européenne n’aime pas les monopoles et veut établir un marché unique de l’énergie électrique.
Pourquoi ? Je n’en sais rien puisqu’en tant qu’économiste, je peux parfaitement justifier de l’existence d’un monopole étatique dans quelque chose d’aussi vital que la fourniture d’énergie. La France avait une politique énergétique de long-terme, les autres non, et je ne vois pas au nom de quoi ces autres pays devaient bénéficier des efforts des Français.
Et que fait la Commission (avec l’accord de tous les gouvernements français) : elle force la France à passer une Loi (Loi NOME) pour forcer EDF à vendre chaque année le quart de sa production nucléaire à prix coutant (42 e/ kWh) à des intermédiaires qui ne produisent aucune énergie mais pourront faire ainsi concurrence dans la vente d’énergie à EDF, même s’ils ne produisent rien.
Pour faire simple, les contribuables français subventionnent gratuitement des sociétés du secteur privé qui ne contribuent en rien à la production d’énergie. Le capitalisme de connivence à son meilleur. La seule obligation pour ces sociétés est d’aller acheter 20 % de leurs fournitures aux clients qu’elles ont piqué à EDF, sur les marchés libres, au prix du marché.
Le prix auquel ces sociétés achètent leur électricité à EDF n’a pas bougé depuis 2012 et est environ à 42 e /kWh , alors que le prix de l’électricité au comptant se balade entre 200 e et 400 e / kWh, ce qui est un joli cadeau fait à des sociétés dont on espère qu’elles financent les campagnes électorales de ceux qui nous gouvernent en ce moment.
Et cette loi est entérinée par le Parlement, sous Sarkozy je crois, dont on découvre avec le temps qu’il a été sans aucun doute le pire des Présidents de la cinquième République (et pourtant, la concurrence est rude), et cette loi précise ce que nous devons faire avec notre énergie électrique excédentaire : subventionner les productions industrielles en Allemagne, en Hollande, en Belgique alors que ces pays n’ont en rien contribué à la construction de nos centrales.
Un bidule étatique de plus est créée (CRE) pour gérer tout ça et pas grand-chose ne se passe jusqu’en 2018, les prix de l’énergie restant aux alentours de 60 e/kWh.
Mais en 2018, les demandes pour l’électricité à bas prix fournie par EDF passent de 25 % de la production totale de la société à plus de 30 %. Et donc la CRE (voir plus haut) fait des quotas , EDF refusant de vendre à perte à ces sangsues. Et ces sociétés, qui ont vendu de l’électricité soi-disant moins chère à vous et à moi se retrouvent en train de devoir acheter sur le marché libre non pas 20 % de leurs ventes , mais trente ou trente cinq pour cent. Et le prix sur le marché libre passe à 100 E/kWh puis 200 e/kWh, puis 300 e kWh, et ainsi de suite. Et toutes ces sociétés qui vous ont vendu de l’électricité à 55e/kWh de se mettre à perdre du fric cul par-dessus tête. Et elles font faillite, ferment et disent à leurs clients de retourner chez EDF. Et le gouvernement français (et la CRE) force EDF à reprendre ces clients.
Admettons qu’EDF, même après avoir vendu un quart de sa production à prix coutant, ait eu encore l’an dernier des capacités inemployées pour 2022.
En bons gestionnaires qu’ils sont, ils les auront vendus en 2021 dans le marché à terme pour 2022 , mettons à 80 e /kWh.
Pour livrer ces clients auxquels ils ne s’attendaient pas, EDF qui a vendu toute sa capacite pour 2022, va devoir racheter de l’électricité au comptant à 300 e/kWh, ce qui va engendrer une perte de 16 MILLIARDS D’EUROS.
Mais le plus curieux est que comme toutes les capacités de production d’électricité en Europe travaillent déjà à plein, pour satisfaire cette demande « inattendue », il va falloir réouvrir des centrales à charbon ou à gaz, en rachetant du charbon ou du gaz, dont les prix bien entendu s’envolent, ce qui accroit les pertes…et ajoute à la pollution.
Et la question qui se pose est : qui va absorber cette gamelle gigantesque ?
- Logiquement, ce devrait être les fournisseurs parasites, mais ils n’ont pas les fonds propres nécessaires et/ou ont déposé le bilan.
- Ceux qui ont cru aux promesses des vendeurs des sociétés sangsues devraient donc assumer leurs pertes, mais ils n’en ont pas les moyens.
- Mutualiser la perte sur tous les utilisateurs d’électricité en France voudrait dire augmenter les prix de l’électricité de 44 % pour vous et moi, mais aussi pour Peugeot et le boulanger du coin, ce qui est difficile trois mois avant une élection présidentielle.
- Et donc, la décision prise par monsieur Macron a été de faire supporter la perte par …EDF, ce que la bourse n’a pas aimé puisque l’action EDF, qui se cassait la figure depuis 2010 et le passage de la loi la spoliant, a baissé de 25 % le jour suivant cette annonce…
Conclusion
Sans l’Europe et sans le gouvernement français, le cours de bourse d’EDF aujourd’hui devrait être à 500 euros au moins : EDF produirait à un coût de 50e/kWh et vendrait tous ses excédents, équivalents à 25 % de sa production actuelle à 300 e /kWh , dégageant des marges gigantesques qui lui permettraient de financer centrales sur centrales aussi bien en France qu’à l’étranger et notre balance commerciale serait excédentaire.
Hélas, la politique suivie par les Sarkozy, Lemaire, Macron etc… a ruiné EDF . Du coup il va falloir faire une augmentation de capital pour combler le trou de 16 milliards, qui à mon avis , sera plutôt de 25 milliards, surtout si les prix du gaz continuent à monter, ce qui parait acquis. Et cela, alors que la France utilise très peu de gaz pour sa production d’électricité. Rendre le prix de l’électricité en France dépendante du prix du gaz alors que nous ne produisons quasiment pas d’électricité avec du gaz est un vrai exploit de notre technocratie. Et encore bravo, nous sommes décidément gouvernés par des génies.
Monsieur Lemaire en automne dernier s’est rendu à Bruxelles pour se plaindre de la situation et s’est fait renvoyer dans ses buts par les Allemands, qui ne nous avaient pourtant pas demandé la permission pour fermer leurs centrales nucléaires ou forcer les autres pays à accueillir des millions de réfugiés en Europe. Nous obéissons donc à l’Allemagne plus qu’à la Commission. A ce propos, dans le dernier numéro de la Revue « Conflits » qui traite des problèmes de géopolitique et à laquelle tous les lecteurs de l’IDL devraient s’abonner tant les articles sont de qualité, il y a un papier incroyable détaillant les manœuvres de la diplomatie allemande à Bruxelles pour torpiller l’industrie nucléaire française et chacun comprendra en l’ayant lu que les nations n’ont pas d’amis mais des intérêts (citation de Lord Salisbury, premier ministre britannique au XIX -ème siècle).
Et quel est l’intérêt de la France ? Reprendre le contrôle d’EDF, produire de l’électricité à 50 e /kWh et ne la vendre qu’à ceux qui produisent en France. Et nous verrons rapidement les usines installées en Allemagne, où il y aura des coupures d’une électricité qui se vendra à 300 e/kWh, déménager très rapidement pour passer le Rhin dans le bon sens et venir s’installer chez nous.
Réindustrialiser la France sera chose facile si nous reprenions le contrôle d’EDF, puisque notre électricité serait quatre fois moins chère que chez nos principaux concurrents.
Et si Bruxelles et Francfort (la BCE) ne sont pas d’accord, tant pis, la solution britannique sera la bonne et nous établirons une zone de libre-échange avec Londres et tout le reste du Commonwealth et pourquoi pas l’Afrique et laisserons l’Allemagne quitter l’Alliance Atlantique et s’inféoder à la Russie, tandis que les Americains déplaceront leurs bases militaires de l’Allemagne à la Pologne. Et les choses seront claires. Mais pour cela, il faut virer Macron, Lemaire, Lagarde et beaucoup d’autres, qui après tout sont soit incroyablement incompétents, soit corrompus, soit des défenseurs du parti de l’étranger, comme le disait de Gaulle, c’est-à-dire des traîtres.
Et à tous les jeunes qui se demandent ce qu’ils doivent faire, la réponse est simple : ne votez en aucun cas pour Macron, engagez-vous dans l’armée, faites Saint Cyr, Navale ou Salon, ou alors faites des études d’ingénieur et créez votre entreprise pour vendre des vraies choses à des vraies gens. Vous serez beaucoup plus utiles et donc beaucoup plus heureux qui si vous vous destinez à faire une école de commerce pour aller bosser dans la City et vendre des produits financiers auxquels vous ne comprenez rien à des gens qui ne les comprennent pas plus que vous.
Economiste et financier, Charles Gave s’est fait connaitre du grand public en publiant un essai pamphlétaire en 2001 “ Des Lions menés par des ânes “(Éditions Robert Laffont) où il dénonçait l’Euro et ses fonctionnements monétaires. Son dernier ouvrage “Sire, surtout ne faites rien” aux Editions Jean-Cyrille Godefroy (2016) rassemble les meilleurs chroniques de l'IDL écrites ces dernières années. Il est fondateur et président de Gavekal Research (www.gavekal.com).