Le lancement par Facebook des Ray-Ban Stories, des lunettes connectées qui capturent des photos et des vidéos, est une nouvelle étape de la stratégie de l'entreprise visant à capturer davantage de vos souvenirs. Il est difficile de ne pas être cynique à propos du partenariat entre Facebook et Ray-Ban (propriété d'EssilorLuxottica). Ma première réaction à ces lunettes intelligentes à 299 euros a été la suivante :
- Voici ce qui se passe lorsqu'un quasi-monopole (Facebook) s'associe au monopole EssilorLuxottica.
- J'ai hâte de voir quelqu'un se faire frapper pour avoir filmé quelque chose qu'il n'aurait pas dû.
- J'ai aussi hâte de voir comment ces lunettes se comporteront dans les vestiaires des gymnases.
- Voilà ce que c'est de toujours vouloir copier Snapchat.
- Elles sont meilleures que les Google Glass, mais la mauvaise réputation des lunettes connectées va rester encore un bon moment.
Mais laissons de côté les plaisanteries sur la collaboration entre Facebook et Ray-Ban et concentrons-nous sur la stratégie. Cette vue d'ensemble tourne autour d'une plateforme de collecte de souvenirs. En d'autres termes, Facebook développe sa pile de technologies avec des lunettes connectées autour de cet objectif.
Vous êtes le produit
Chez Facebook, vous êtes le produit. Chez Facebook, vos souvenirs et vos contenus sont la recette secrète pour vous faire revenir. Bref, vos données constituent l'avantage concurrentiel de Facebook.
Considérez les phases stratégiques qui s'articulent autour de ce produit.
Phase 1 : construire la base de données et la plateforme de collecte de souvenirs. Facebook et Instagram s'articulent autour du concept de connexion avec la famille et les amis, mais en fin de compte, les deux plateformes sont des instances de stockage pour vos photos, vidéos et pensées. Des instances de stockage qui ne vous appartiennent pas, bien sûr, vous l'aviez oublié. Quiconque reçoit un rappel d'un souvenir datant d'il y a sept ans sait à quel point Facebook peut vous faire remonter le temps. Je parie que nous finirons tous par revivre ces souvenirs avec un plaisir non dissimulé dans un monde créé par Facebook.
Phase 2 : créer un environnement (pensez à un métavers) et des points de terminaison pour livrer ces souvenirs, qui seront suffisamment collants pour vous monétiser à vie. Quelqu'un pense-t-il vraiment qu'Oculus est développé pour faire des jeux, de la réalité virtuelle et des nouveaux modes de communication ? Peut-être. Ma théorie est qu'Oculus vise en réalité à améliorer la technologie qui vous éloignera du présent. La technologie va s'améliorer au point que nous pourrons revivre les bons souvenirs du passé via Oculus. Les souvenirs seront transférés via une connexion API au casque Oculus depuis Facebook. Pour mieux comprendre, lisez cette courte histoire sur la Relive Box du New Yorker.
Phase 3 (ou plutôt 2 bis) : créer son propre point de terminaison et son propre écosystème pour pouvoir contrôler son destin. Facebook ne possède pas le système d'exploitation ou la plateforme des smartphones et a besoin d'un dispositif comme les lunettes connectées pour s'affranchir de ses rivaux qui possèdent les écosystèmes mobiles. Google a Android et Apple a iOS. Microsoft a Windows. Mark Zuckerberg ne doit pas être très heureux d'être à la merci de géants technologiques rivaux. Amazon a sa propre pile qui tourne autour d'Alexa, du commerce électronique et d'un écosystème de maison connectée.
Nous sommes quelque part entre les phases deux et trois de la construction de la pile de Facebook. Si suffisamment de gens achètent des Ray-Ban Stories, Facebook trouvera son point de terminaison. Les lunettes connectées de Ray-Ban et Facebook sont bien plus élégantes que tout ce qui a été créé auparavant. Peut-être que Ray-Ban Stories influencera le design d'Oculus à l'avenir.
Sur les traces des autres GAFA
Si Facebook devient un acteur des lunettes connectées, il peut contourner les smartphones et créer une connexion directe de son réseau social à vos souvenirs. Si Facebook ne devient pas cette plateforme de souvenirs, il deviendra peut-être le prochain AOL.
Facebook n'est pas différent des autres grands acteurs technologiques. Ils travaillent tous sur le principe bien connu de la plateforme. Possédez la plateforme et vous gagnez. Google, Apple et Amazon sont tous dans cette stratégie. La différence est que Google, Apple et Amazon proposent tous de la valeur en échange de vos données.
Ce que Facebook possède, ce sont vos souvenirs et le contenu qui les documente. L'incursion de Facebook dans les lunettes connectées vise à capturer davantage de ce contenu d'une manière plus intime. Conclusion : Facebook possède déjà une grande partie de vos souvenirs et cherche à en capturer beaucoup plus.
Source : ZDNet.com