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Le Blog de jlduret

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Pensez juste ou pensez faux mais pensez par vous-même ! Depuis Socrate, le devoir du penseur n’est pas de répéter la doxa du moment mais de la questionner.


Ni parasites, ni nantis, ni assistés : Les retraités sont des assurés !

Publié par jlduret sur 18 Avril 2019, 18:42pm

Catégories : #Retraités

Ni parasites, ni nantis, ni assistés : Les retraités sont des assurés !

En pleine réforme des retraites, une fable redoutable nuit considérablement aux retraités, en faisant croire qu’ils sont quasiment les obligés de la population active, parce que les cotisations des actifs financent leurs pensions. Pour mieux réfuter cette mystification, nous la disséquerons dans un premier temps (I), puis nous la dissiperons à travers le triple spectre d’une approche juridique (II), assurancielle (III) et statistique (IV). Ceci fait, nous reviendrons brièvement sur les vérités à rétablir (V) et avant de conclure (VII), nous proposerons une synthèse (VI) qui montre qu’en réalité, les retraités ne sont ni des parasites, ni des assistés, mais bien des assurés ou des ayants-droit.

I – LA FABLE OFFICIELLE

D’éminents spécialistes des retraites et le Président Macron lui-même, ne cessent de la répéter en boucle. Tous prétendent que, puisque les cotisations des actifs ont servi à payer les pensions des retraités, lorsque ces actifs arrivent à la retraite, ils n’ont en conséquence plus aucun droit propre ou personnel à faire valoir. Partant, les retraités ravalés au rang de parias sont systématiquement exclus :

- de toutes les instances publiques qui débattent et qui décident des retraites (notamment Conseil d’Orientation des Retraites, Comité de Suivi des Retraites et Haut-Commissariat à la Réforme des Retraites...),

- de la plupart des Conseils d’Administration des Caisses qui leur versent leurs pensions.

Or cette analyse discriminante cumule deux défauts :

- elle repose sur deux hold-up absolument abracadabrants :
le premier au détriment des cotisants, lorsque leurs cotisations sont affectées sans retour au payement des pensions en cours, 
le second quelques décennies plus tard au bénéfice des mêmes cotisants lorsqu’ils deviennent à leur tour retraités, puisque qu’ils récupèrent alors à leur profit le droit de "rapine" que les retraités de la génération précédente auraient exercé sur leurs propres cotisations ;

- elle découple abusivement les cotisations des pensions et ces dernières deviennent de simples dépenses publiques relevant de l’assistanat. Ce déclassement de leurs pensions ravale les retraités au rang de parias, dont on ne se rappelle opportunément l’existence qu’aux échéances électorales majeures et la plupart du temps pour les berner (cf. la garantie "macronienne" du pouvoir d’achat !).

En réalité, économiquement injuste et socialement désastreuse, cette analyse est surtout juridiquement fausse, comme le prouvent les deux prismes convergents de l’analyse institutionnelle et de l’analyse assurantiel, auxquels vient récemment de s’ajouter l’évaluation par l’INSEE des engagements résultant de la répartition.

II - L’APPROCHE JURIDIQUE

En effet, rivée au principe de la répartition, l’obligation de solidarité intergénérationnelle implique que les cotisations des cotisants fondent juridiquement - quelques décennies ou quelques années plus tard - les pensions des retraités, car ce sont exactement ... les mêmes personnes qui se trouvent d’abord à cotiser, puis à percevoir.

En effet, l’affectation des cotisations des actifs au payement des pensions des retraités est purement financière et juridiquement elle ne dépouille pas les cotisants de leurs droits futurs à pension. Car en référence au Préambule de la Constitution qui fonde le droit du travailleur âgé à une fin de vie décente, le Code de la Sécurité Sociale (cf. article D 161-2-1-8-2) rappelle l’existence d’une obligation de solidarité intergénérationnelle qui organise une chaîne de solidarité entre les générations. C’est tout simplement ce qui évite à notre système de répartition de verser dans une pyramide de Ponzi, dont l’affaire Madoff a révélé tous les risques.

LA SOLIDARITÉ INTERGÉNÉRATIONNELLE

Quand naît, puis croît un enfant (génération G), il demeure tout le temps de son enfance et de son éducation à la charge de ses parents (génération G-1). Une fois terminée sa formation et parvenu à l’âge adulte, il va s’insérer dans la population active :
- d’une part en versant des cotisations en vue de sa propre retraite bien que leur collecte serve à financer la retraite de ses parents (génération G-1),
- d’autre part, en engendrant des enfants (génération N+1) qu’il élèvera et éduquera à son tour.

Enfin l’âge venant, il partira lui-même à la retraite et percevra -au titre du lien de concomitance - une pension certes payée avec les cotisations versées par ses enfants (génération G+1) alors entrés dans la vie active, mais néanmoins issue juridiquement -au titre du lien d’existence- des cotisations qu’il a lui-même versées durant toute sa carrière et qui déterminent le montant de ses droits.

Donc, l’affectation des cotisations des actifs au service des pensions des retraités ne prive nullement les premiers d’un droit de créance sur le système de retraite qu’ils liquideront et mobiliseront le jour venu au moment de leur cessation d’activité. Sinon, comment expliquer que des actifs irréversiblement dépouillés de leurs cotisations passées puissent miraculeusement recouvrer leurs droits disparus lorsqu’ils cessent leur activité ? Cette analyse juridique vous paraît un peu compliquée ? Rassurez-vous, la voie alternative de l’analyse assurantielle devrait aisément vaincre vos dernières réticences.

III – L’APPROCHE ASSURANCIELLE

Dans la droite ligne des assurances sociales, le Code de la Sécurité Sociale (cf. Titre 6, chapitre 1er, sous-section 4) inscrit formellement les retraites dans le cadre d’une "assurance-vieillesse" en désignant expressément le bénéficiaire comme un "assuré" dont les droits de base sont gérés par la "Caisse Nationale d’Assurance-Vieillesse" (CNAV). Dès lors, la logique est imparable : la retraite, c’est une véritable assurance puisqu’elle en réunit les trois éléments constitutifs :

- des primes : ce sont les cotisations versées durant toute la période d’activité ;
- un sinistre, qui demeure bien éventuel puisque subordonné à la survie de l’assuré lors de son départ à la retraite, une indemnisation, qui consiste alors en une rente viagère calculée en fonction du total des "primes" précédemment acquittées.

L’EXEMPLE

Un assureur qui affecte les primes de ses clients à l’indemnisation des sinistres survenus à certains d’entre eux, ne peut exciper des indemnisations qu’il a déjà versées pour refuser à un nouveau sinistré tout droit à indemnité.

1 -juridiquement, le contrat d’assurance est un contrat synallagmatique (d’engagement réciproque entre les parties). En contrepartie du versement régulier par le client de la prime convenue, l’assureur est tenu d’indemniser le sinistre éventuellement subi par l’assuré. Dés l’origine, il y a donc bien une relation indissociable entre la prime et l’indemnisation du sinistre assuré et l’assureur ne peut évidemment s’en dédire au prétexte que les primes versées par l’assuré ont été déjà consommées dans l’indemnisation d’autres sinistres.

2 - en droit des assurances, l’assureur est tenu de provisionner techniquement les sinistres à venir. Or ce sont bien les polices souscrites et les provisions techniques qui en découlent qui assurent la couverture des droits des assurés et non pas les nouvelles primes recouvrées ou en cours de recouvrement sur des tiers.

Donc par quelque bout qu’on la prenne, l’analyse officielle ne tient pas la route et en réalité, elle vise uniquement à déstabiliser les retraités et à les décrédibiliser auprès de l’opinion. Il ne s’agit rien moins pour un exécutif financièrement aux abois que de dégager sur les retraites des marges de manœuvre qu’il demeure rigoureusement incapable d’extraire de la réduction d’une dépense publique qu’il chérit comme un vice.

IV – L’APPROCHE STATISTIQUE

Une dernière source achève de mettre à mal la fable officielle : l’INSEE, lui-même, qui pourtant ne peut pas être suspecté d’œuvrer contre le pouvoir qui le contrôle. En effet, comme le rapporte le COR dans un document daté du 11 juillet 2018, l’Institut évalue tout simplement entre 8 108 (avec un taux d’actualisation à 3%) et 9 804 milliards d’euros (avec un taux d’actualisation à 2%) soit aux alentours de 4 années de PIB, les engagements en cours à fin 2015 résultant de la répartition au titre des seuls régimes obligatoires. Qui plus est ces estimations sont requises parmi les informations obligatoires à fournir chaque année à Bruxelles Si donc il y a des engagements qui persistent et que leur évaluation est exigée par les autorités européennes, cela confirme donc bien que les actifs n’ont pas du tout abdiqué leurs droits à retraite au profit des retraités sous prétexte que les cotisations des premiers auraient servi à payer les pensions des seconds. Le grief du pouvoir reprochant aux retraités de vivre sur le dos des actifs tient en réalité de l’intoxication, puisqu’il se trouve en contradiction flagrante avec la démarche de son propre statisticien et les exigences de Bruxelles. L’évaluation de l’INSEE confirme à la fois l’évidence et le bon sens, à savoir que les cotisations versées par les actifs leur créent des droits différés à pension – les fameux engagements – qu’on ne peut rayer d’un trait de plume ou d’une imposture.

V – LES VÉRITÉS À RÉTABLIR

On l’a vu, la doctrine officielle fausse sciemment l’analyse. Or tenter de culpabiliser les retraités, en les considérant comme des parasites, parce que leurs pensions absorbent environ 14% du PIB national, constitue un chantage aussi odieux qu’indigne. En effet, en dehors de l’Inspection des Finances, toute personne qui possède le moindre rudiment de comptabilité sait que tout mouvement financier comporte une origine et un dénouement. Or là curieusement, toutes nos "pointures" qu’obnubile le "dénouement" – la pension des retraités – oublient que ce payement n’a pu advenir que parce qu’il avait pour "origine" la longue suite des cotisations versées par ces retraités du temps de leur activité.

Par ailleurs, l’analyse assurancielle interdit aux chasseurs de coûts, comme d’ailleurs au COR, qui vient une nouvelle fois d’emprunter cette piste périlleuse d’invoquer le niveau de vie – actuellement légèrement supérieur à la moyenne générale - des retraités pour rogner leurs pensions. En effet a-t-on jamais vu un assureur "mégoter" son indemnisation en fonction de la plus ou moins grande aisance supposée de son client ? Enfin, il est intellectuellement stupide et socialement fort dangereux d’opposer celui qui acquitte des cotisations à celui qui perçoit une pension : car à quelques décennies d’écart et parfois à bien moins, on l’a vu, c’est exactement le même assuré social !

VI – LA SYNTHÉSE

La vie complète d’un être humain croise alternativement deux périodes d’environ deux décennies chacune, durant lesquelles il consomme de la solidarité (enfance+vieillesse), avec une troisième période d’un peu plus de quatre décennies, sur laquelle il fournit de la solidarité (vie active). C’est pour cette raison qu’il est aussi navrant :

- de vouloir dresser les générations G-1/G/G+1 les unes contre les autres, alors qu’elles sont biologiquement interdépendantes, économiquement liées et chronologiquement consécutives,

- que de tailler indument dans les pensions, car c’est toujours la même personne qui, dans un premier temps, dépend de ses parents, avant dans un second temps d’assumer à la fois la charge de leur vieillesse et celle de l’éducation de ses enfants pour, l’âge venu, dépendre enfin de ces derniers.

UNE SOLIDE OPPOSITION À PRÉVOIR

En effet, la fable des "sans droits" permet à tous les détracteurs des retraités de vouer à la vindicte et au pain sec cette population de rentiers et de nantis, à la traîne des actifs. Pensez donc, des vieux qui captent égoïstement à leur profit des centaines de milliards, qui pourraient être si utilement dirigés vers les puits sans fond des politiques de la Ville ou la "Coopérative des Assistanats Réunis". D’éminents spécialistes nous expliqueront même qu’en réalité l’assurance-vieillesse n’est pas une véritable assurance, tout comme la répartition n’est qu’une pompe aspirante qui engloutit sans jamais rendre. Désolé : une assurance reste intrinsèquement une assurance et toute répartition comporte nécessairement deux temps : celui du prélèvement des cotisations, puis celui de la redistribution des pensions et c’est même ce second temps qui parachève la répartition en lui donnant tout son sens !

VII – CONCLUSION

Donc par quelque bout qu’on prenne la question, par le droit, par l’assurance ou par la statistique, les retraités ont un droit inaltérable et personnel au versement de leurs pensions, lorsqu’ils arrivent à la retraite. Ceci prouve qu’au plus haut niveau, le pouvoir participe directement à ces "entreprises malveillantes de désinformation" qu’il condamne résolument chez les autres. Tout le débat des retraites, toute la réforme des retraites engagés sur ces bases fallacieuses qui considèrent indument le retraité – et encore plus, son conjoint survivant - comme une sorte d’assisté et d’incapable majeur, doivent être d’urgence corrigés et recentrés. En effet, le retraité n’est pas un acteur mineur, pas davantage un "accessoire" de notre assurance-vieillesse, c’en est la clef de voûte. Il figure l’aboutissement nécessaire, hors duquel ne peuvent subsister les fondements même d’un des piliers majeurs de notre Sécurité sociale. Les générations actives présentes feraient bien d’y réfléchir, avant de découvrir trop tard que les charlatans, qui leur font miroiter aujourd’hui de mirifiques assignats, leur auront en réalité demain volé toutes leurs retraites.

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