L’écologiste est formel: « Sans le nucléaire, notre société ne fonctionnera pas ». La réduction de la consommation énergétique et le remplacement du fossile par l’intermittent pourrait avoir des conséquences encore plus dramatiques pour nos sociétés que le réchauffement.
Décroissance
Bertrand Cassoret attire l’attention des autorités sur l’erreur d’un abandon total du nucléaire. Ingénieur, docteur en génie électrique et défenseur de la transition énergétique, il est engagé dans un mode de vie qui préserve l’environnement:
« Bertrand Cassoret s’éclaire aux lampes basse consommation, récupère l’eau de pluie, jardine sans pesticides, trie consciencieusement ses déchets, composte, mange bio (et quasiment plus de viande)… »
Pourtant il recommande le recours au nucléaire si nous voulons éviter des révoltes sociales, des pertes de places de travail, un amoindrissement des services en quantité et en qualité, un abaissement catastrophique de notre qualité de vie, en bref un lent effondrement de notre monde développé. Son analyse .
Voici quelques extraits d’une interview disponible ici. À la question: « … les dirigeants politiques qui prônent l’abandon du nucléaire regretteront demain les Gilets jaunes d’aujourd’hui, tant la révolte du peuple sera forte en cas de transition vers le renouvelable », il répond:
« Complètement ! Le manque d’énergie est potentiellement catastrophique. (…) … si l’on manque d’énergie, on va inévitablement vers la décroissance économique.
Précarité
Je ne suis pas un partisan de la croissance perpétuelle, je sais bien que nous sommes dans un monde fini. Néanmoins, prôner la décroissance, la simplicité et la sobriété, j’ai du mal à y croire, car cela signifie imposer la pauvreté. Michel Rocard avait complètement raison quand il disait que la décroissance peut mener à la guerre civile. »
La guerre civile!
Il fait aussi l’apologie de nos sociétés développées ici:
« … notre consommation d’énergie abondante a permis d’améliorer nos conditions de vie et a fait que notre espérance de vie, dans les pays riches, est bien meilleure. C’est tout le paradoxe. Dans les pays pauvres, on consomme peu d’énergie, on ne vit pas longtemps. On s’aperçoit que plus on consomme d’énergie, plus on vit longtemps. Mais, en même temps, on pollue davantage et on développe des maladies qui peuvent jouer sur la santé et avoir l’effet inverse de ce qui était escompté au départ… C’est toute la complexité de cette histoire. Qu’est-ce qui fera le moins de morts ? Est-ce le manque d’énergie ? La pollution ? Le réchauffement climatique ? Une catastrophe nucléaire de temps en temps ? »,
et ici, soulignant comment nos sociétés évoluées et énergivores ont fait reculer la précarité historique des populations humaines:
« Certes, il y a encore beaucoup de gens qui ont des conditions de vie précaires, mais regardez comment les gens vivaient au début du XIXe siècle, avec une espérance de vie de 35 ans… La plupart des gens habitent un logement décent et mangent tous les jours, avec un accès à l’éducation, aux soins médicaux, à la culture et aux loisirs. »
Indépassable
Il considère que le populisme multiséculaire de gauche, qui se traduit par prendre aux richesplutôt qu’aux petits gens, à Total plutôt qu’à l’automobiliste rural lambda, a ses limites:
« … on ne peut pas limiter le réchauffement climatique en s’en prenant uniquement aux gros industriels, car si les gros industriels polluent, c’est parce qu’ils nous vendent des produits que l’on achète… Si l’on pense au carburant, limiter le réchauffement climatique, c’est limiter le nombre de véhicules particuliers sur les routes. La première cause d’émission de gaz à effet de serre, c’est le transport avec les voitures particulières. Si l’on veut lutter contre le réchauffement climatique en France, il faut commencer par lutter contre les déplacements des particuliers et c’est très compliqué ! »
Il regrette que la France se soit laissée dépasser sur le plan technologique avec les réacteurs de 4e génération. Écolo convaincu, il enfonce pourtant le clou douloureux dans le dogme définitif, la limite indépassable des Verts européens:
« Il ne s’agit pas de dire qu’il ne faut plus d’énergies renouvelables, il s’agit de dire que le nucléaire est la seule source d’énergie qui puisse permettre aux pays riches et développés de continuer à vivre de manière évoluée. Il ne s’agit pas de dire qu’il faut gaspiller tout ce que l’on peut gaspiller, parce qu’il y a des tas de choses que l’on pourrait faire pour consommer moins, mais je pense que cette société développée, où les gens ont des demandes en matière sociale, de soins médicaux et d’éducation, a besoin d’une énergie abondante. La seule solution pour remplacer les énergies fossiles, ce sont les technologies nucléaires. »
Le dogme anti-nucléaire des Verts est si enraciné dans leur doxa qu’il semble indépassable. S’ils s’accrochent à une posture intellectuelle trop conservatrice – et déjà archaïque parce que binaire, clivante, excluante et dangereuse pour l’avenir de nos sociétés évoluées – il faudra se passer d’eux afin de rétablir toutes les solutions dans un débat ouvert et sans préjugés.
Ou alors il faut accepter de vivre avec moins de services, moins de sécurité, avec des coupures électriques quotidienne même dans les entreprises et les hôpitaux. Seuls ceux qui auront de gros moyens accèderont à des services de qualité dans des réserves urbaines riches protégées derrières des clôtures barbelées.