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Le Blog de jlduret

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Pensez juste ou pensez faux mais pensez par vous-même ! Depuis Socrate, le devoir du penseur n’est pas de répéter la doxa du moment mais de la questionner. Sans cette liberté d’exprimer opinions et pensées, point de démocratie.


Le million-et-unième « appel »

Publié par jlduret sur 10 Septembre 2018, 19:30pm

Catégories : #Réchauffement climatique

Le million-et-unième « appel »

Normalement, je devrais être en train d’écrire quelque chose sur la première journée de la conférence organisée à l’université de Porto par l’Independent Committee on Geoethics. Et puis je suis tombé sur un nouvel appel incontournable, cette fois publié par Libération.

Les climato-réalistes n’étant pas encore « maîtres des horloges » (©Emmanuel Macron), il me semble hélas plus urgent de réagir à cette nouvelle bêtise alarmiste que de faire un compte-rendu de ce qui s’est passé à Porto aujourd’hui.

Rien qu’à voir la couverture de Libé annonçant ce million-et-unième «appel», on sait d’emblée que l’intelligence et le sens de la mesure n’y ont pas leur place.

Une telle couverture nous fait entrer d’emblée dans la climatologie tabloïde dont on n’est certes pas surpris que Libé se fasse le porte-voix complaisant.

700 scientifiques, c’est du lourd

Autre chose, a dû se dire Libé, que les acteurs et chanteurs de l’appel précédent qu’a lancé le concurrent Journalderéférence il y a à peine quelques jours. Et vu l’indigence pitoyable de cet autre appel (il va bientôt falloir les numéroter pour qu’on s’y retrouve), on peut penser qu’il a été demandé aux signataires de faire en sorte que les lecteurs en aient cette fois un peu pour leur argent.

Ils n’ont pas dû être déçus : des drames, de la peur, des excès, des affirmations fausses… on a droit à tout. Les acteurs du millionième appel de l’autre jour n’avaient rien à dire, au fond c’était peut-être mieux.

Je vais me concentrer sur le tout début de l’appel, en principe le plus «scientifique» de l’appel, au sens où il est censé, comme d’habitude, peindre le paysage qui justifie l’action rapide, les efforts massifs, l’absolue nécessité de tout repenser, et autres changements de paradigme.

Nous sommes d’ores et déjà pleinement entrés dans le «futur climatique». Hausse des températures moyennes et récurrence des chaleurs extrêmes, y compris dans le nord de notre hémisphère tout cet été, fonte des glaciers et de la banquise, sécheresses, modification de l’aire de distribution de certains animaux et espèces végétales, destruction d’écosystèmes rares et précieux, hausse du niveau de la mer, désoxygénation et acidification des océans, etc. : les manifestations concrètes du changement climatique ne cessent de s’accumuler. Quant au futur, les projections d’impact sur les milieux, les espèces et les humains sont systématiquement revues à la hausse au fur et à mesure des nouvelles connaissances.

NON il n'y a pas de hausse

La hausse des températures moyennes est principalement tirée de l’imagination fertile des signataires, qui tient davantage du wishful thinking que de l’analyse raisonnable des données disponibles. On sait en effet que, hormis un récent événement océanique (El Niño) qui a ponctuellement réchauffé la Terre en 2015-2016, la température moyenne de la planète est relativement stable depuis le début du siècle.

Même les carbocentristes les plus acharnés conviennent a minima que l’augmentation de la température a fortement ralenti ces dernières années. Pour l’illustrer, voici  les données satellitaires UAH en figure 1.

La courbe bleue montre clairement que nous sommes sortis de l’El Niño et que, hormis donc cette singularité d’origine parfaitement naturelle (mais mal comprise), les fluctuations de température tournent autour d’une valeur qui n’évolue pas beaucoup depuis environ 2001.

Même le GIEC en a d’ailleurs convenu dans son dernier rapport (la fameuse Box 9.2).

Quand "Libération" est malhonnête

Aussitôt ensuite vient ce morceau de phrase qui relève de la pure malhonnêteté intellectuelle au sujet de la « récurrence des chaleurs extrêmes, y compris dans le nord de notre hémisphère tout cet été« . D’abord, les signataires n’ont pas l’air au courant que l’hémisphère nord a aussi connu des épisodes neigeux inattendus cet été en Amérique du nord aussi bien qu’en Europe centrale.

(Reconnaissons toutefois que, l' »appel » étant franco-français, il convient de postuler que la France représente le monde.)

Ensuite, la météo n’est pas le climat : il peut très bien faire chaud un été quelque part dans le monde sans que cela soit représentatif, et… bon, j’arrête, j’entends déjà des contradicteurs m’expliquer que je suis dans une posture de déni et que je refuse de voir l’évidence.

Prenons donc les choses d’une autre manière. En décembre dernier, l’Amérique du nord a connu une grosse vague de froid, conduisant Donald Trump à publier le tweet que vous avez pu lire et qui est une ânerie, évidemment, car comme je viens de le dire la météo n’est pas le climat, et un événement ponctuel ne prouve rien.

Heureusement, quand il s’agit de s’en prendre aux négationnistes du climat, nos vaillants climatologues sont là. (Ouf !) Par exemple, découvrant l’énormité proférée par le vilain Trump, le sang de Valérie Masson-Delmotte n’avait fait qu’un tour sur FranceInfo :

franceinfo : Comment avez-vous réagi en découvrant ce tweet de Donald Trump ?

Valérie Masson-Delmotte : Quand j’ai pris connaissance de ce tweet, j’ai cru que c’était une caricature et c’est malheureusement le président des Etats-Unis qui s’est ainsi exprimé. Ce qu’il fait c’est qu’il confond la météo, localement et instantanément, et le climat, c’est-à-dire l’évolution à l’échelle de la planète et sur le long terme. Malgré la vague de froid aux Etats-Unis, si l’on prend par exemple l’ensemble des températures à la surface de la terre, aujourd’hui on est à 1°C de plus ponctuellement par rapport aux températures moyennes des 30 ans précédents.

On voit qu’il y a vraiment une volonté de tromper le public comme l’avait fait un sénateur conservateur américain il y a quelques années qui s’était filmé jouant avec une boule de neige pour mettre en cause la réalité du changement climatique.

Au cas où vous auriez un doute : oui, Valérie Masson-Delmotte fait bien parti des 700 de l’appel d’aujourd’hui où le coup de chaud de cet été sert d’argument dès la troisième ligne. Figure 2

Bel exemple de lucidité scientifique à géométrie variable, donc. C’est la méthode du cliquet, bien connue de la climatologie contemporaine : quand il fait chaud c’est le climat, quand il fait froid c’est la météo.

Bien sûr, ce type d’entorse à la rigueur doit être toléré puisqu’il s’agit de faire le Bien. D’ailleurs, ne trouve-t-on pas aussi dans la liste des signataires cet autre membre de la fine fleur de la climatologie carbocentriste française qu’est François-Marie Bréon qui, il y a quelques semaines, étalait dans Libération (déjà) son appel à la dictature climatique

Il est 2h40 du matin ici à Porto, alors j’espère que vous ne m’en voulez pas de ne pas poursuivre mon exégèse de ce nouvel appel. Rien que les trois premières lignes en ont déjà dit fort long. La banquise, la hausse du niveau marin, l’acidification… il faudrait finir d’y passer la nuit.

Eux sont 700, ils ont le temps et les moyens… il y a quand même des moments où on se sent bien petit devant les efforts qui restent à accomplir pour sortir enfin de cette nasse.

Figure 1

Figure 1

Figure 2

Figure 2

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