Ré-édition d'un article de 2014 !
Qu'est ce qui a changé ? RIEN
Par Michel Gay.
Parmi les citoyens, qui a lu les rapports de la Cour des comptes de février 20111, janvier 20122 et de juillet 20133 sur les énergies renouvelables, le nucléaire et la transition énergétique ?
Qui a lu le rapport du Commissariat général à la stratégie et à la prospective (CGSP) de janvier 2014 intitulé « La crise du système électrique européen » ?
L’énergie est pourtant le fondement de toutes les civilisations modernes. Une meilleure connaissance des réalités et des enjeux énergétiques permettrait à chacun, d’une part, d’intervenir dans le débat public sur l’énergie pour ne plus se laisser abuser par des lobbies divers, fussent-ils « verts » et, d’autre part, de disposer d’arguments pour se faire entendre.
Verte, mais à quel prix ?
Mais une question complexe est occultée et donc rarement traitée : les coûts et tarifs de l’électricité dont la production doit répondre en permanence au besoin variable. Aborder ce sujet implique de dire la vérité et donc de s’exposer à la vindicte de l’écologie politiquement correcte.
Le rapport de février 2011 analysait déjà le surcoût de l’électricité « renouvelable ».
Il indiquait que « le caractère incontrôlé » du photovoltaïque avait entrainé un « effet d’aubaine » et des surcoûts. Il qualifiait la CSPE « d’imposition innommée » car frappant tous les consommateurs.
Cet « impôt » aurait dû faire l’objet « d’un contrôle du Parlement, conformément au principe constitutionnel du consentement à l’impôt ».
On peut donc légitimement se demander comment un lobby écologiste a pu créer un impôt par décret, sans vote et sans contrôle du Parlement.
Il faut rappeler que le prix de l’électricité en France est le plus bas d’Europe actuellement. (NDLR : mais plus pour longtemps)
On ne peut pourtant pas prétendre défendre la population modeste, les salariés, les défavorisés en situation de précarité énergétique et dilapider des sommes colossales au bénéfice de « maffias vertes » ou d’une idéologie politique délirante qui fera grimper le prix de l’électricité de 50% en 2020.
En effet, le surcoût des « Énergies Renouvelables chiffré dans le rapport de la « Cour des comptes » publié le 26 juillet 2013 s’élève à 70,1 milliards d’€ (Md€) pour la période 2005 à 2020.
Rappel des faits.
Le 18 juillet 2012, le Sénat publie un rapport annonçant l’augmentation du prix de l’électricité….estimée à 50% d’ici 2020. Cette assemblée pointe deux raisons à cette hausse : les investissements à réaliser sur le parc nucléaire après l’accident de Fukushima pour une petite part et…. le développement des énergies renouvelables subventionnées pour une grande part.
Le 26 novembre 2012 : la CRE (Commission de Régulation de l’Énergie) déclare dans un communiqué que le surcoût des énergies renouvelables nécessite « de lever 5,1 Md€ en 2013 » auxquels il faut ajouter 2,1 Md€ de rattrapage de 2012, le gouvernement ayant limité l’augmentation du prix de l’électricité pour des raisons électorales.
Le surcoût total est donc de 7,2 Md€ pour 2013 au titre de la CSPE (Contribution au Service public4 de l’Électricité). Pour des raisons politiques, le gouvernement choisit de limiter l’augmentation à 2,5%.
1er janvier 2013 : le gouvernement décide à nouveau d’augmenter le tarif de l’électricité de 2,5%.
Début janvier 2013 : le gouvernement décide d’attribuer 4,9 Md€ à EDF pour compenser le retard de l’augmentation nécessaire, mais refusée, de la CSPE. Cette somme est payée par tous les contribuables qui sont souvent aussi les consommateurs.
Début juin 2013 : la CRE demande une hausse de 9,6% du tarif de l’électricité, que le gouvernement a plafonné à 5% et fait appliquer … le 1er août. C’est plus discret pendant la période estivale.
Une augmentation de 5% est programmée pour août 2014 et une suivante aussi de 5% pour 2015, soit au total 18,65%. Nous sommes dans la droite ligne pour aboutir à l’augmentation chiffrée par la CRE, soit 30% d’ici 2017.
Un objectif injustifié
Sous la pression des lobbies de l’écologie politique, les gouvernements successifs (de droite comme de gauche) se sont engagés, depuis les années 2000, sur des objectifs de développement des énergies renouvelables. Ces engagements peuvent être justifiés dans les pays pollueurs produisant majoritairement leur électricité au charbon, au gaz et au fioul (Allemagne, Danemark, Pologne…).
En Allemagne, les médias totalement intoxiqués par l’écologie politique vantent quotidiennement les énergies renouvelables allemandes. Leur niveau est effectivement élevé….
Mais la réalité est soigneusement masquée.
Depuis l’arrêt (partiel) du nucléaire, 13 centrales au charbon on été construites, une vingtaine est en construction ou en projet.
Le développement du gaz de schiste aux USA a fait baisser le cours du charbon. L’Allemagne a donc importé en plus 66 millions de tonnes de charbon des Etats-Unis en 2012. Rappelons que la production d’un kWh au lignite dégage 1100 g de CO2 dans l’atmosphère, 900 g pour la houille, 400 g pour le gaz et … 3 g gramme pour le nucléaire et l’hydraulique.
De plus, la production de chaque TWh (un milliard de kWh) avec du charbon projette dans l’atmosphère 300 kg d’Uranium, 500 kg de Thorium, ainsi que du mercure, de l’arsenic et de l’antimoine.
En France, la production électrique n’émet quasiment pas de CO2. Le développement de ces énergies renouvelables chères et intermittentes, tels que les éoliennes et le photovoltaïque, est injustifié. En témoigne l’étude réalisée (6 mars 2013) pour le « Forum Économique Mondial » :
« La France a le troisième meilleur système électrique au monde » sur les 102 pays étudiés.
Seule la Norvège à production presque totalement hydraulique (avec un peu de gaz) et la Suède (nucléaire et hydraulique) ont un meilleur palmarès.
En France, la production (arrondie) d’électricité nucléaire est de 75%, l’hydraulique 10%, et les énergies fossiles (charbon, gaz, fioul) 10%. Les divers renouvelables (cogénération et biomasse 1,1%, l’éolien 3% et le photovoltaïque 0,8%) génèrent un surcoût abyssal auquel la Cour des comptes consacre les 221 pages de son rapport de juillet 2013.
L’analyse de la Cour des comptes
- malgré le coût exorbitant (dû essentiellement à la « bulle photovoltaïque » et à son caractère spéculatif) les objectifs d’électricité renouvelable ne sont pas atteints (p 34).
- les décisions des gouvernements successifs sont caractérisées par « l’absence d’une stratégie clairement identifiée sur l’organisation du système électrique du futur » (p 49)
- manque de contrôles. Le CIDD (Crédit d’Impôt Développement Durable) n’est pas contrôlé (manque de moyens des services fiscaux) et repose sur un « système déclaratif » (p 46).
FRAUDES
Les fraudes sont essentiellement constatées dans le photovoltaïque où la bulle spéculative et l’effet d’aubaine ont véritablement explosé. La Cour identifie trois modes de fraudes (p 70).
Un quatrième système ne peut être qualifié de fraude car aucune loi n’a anticipé ni créé un système de contrôle. Il s’agit des prétendus bâtiments agricoles « surdimensionnés » par rapport aux besoins de l’exploitation. Les avocats fiscalistes de la FNSEA5 ont dû s’en donner à cœur joie.
- l’expertise est insuffisante, entraînant une mauvaise connaissance des coûts (par l’État) sur des sujets financièrement très lourds (p 63).
- absence d’un suivi statistique d’ensemble des emplois. Il n’y a pas de définition unique des emplois à décompter (p 64). Ce qui permet au lobby « écologiste » d’annoncer des chiffres fantaisistes d’emplois créés.
- impact économique insuffisamment évalué. Ainsi « la décision de développer une filière éolienne en mer (offshore) a été justifiée par des perspectives en termes d’exportation et de création d’emplois » ….mais « aucune évaluation économique approfondie » n’a été menée (p 65). Et cela va coûter 1,1 Md€ de surcoût/an pendant 20 ans, plus un Md€ pour les raccordements.
- mauvaise utilisation des appels d’offre. La Cour note que le projet « E.ON Provence Biomasse » convertissant l’ancienne centrale au charbon de Gardanne importera 48% du granulé de bois ….du Canada, des USA et d’Amérique du Sud (p 67). Ces importations alourdiront notre facture énergétique et aggraveront notre déficit commercial.
- la gestion de l’intermittence (du PV et de l’éolien) reste à mettre au point (p 77). Le stockage est étudié mais peu développé. Seules fonctionnent des STEP (Stations de Transfert d’Énergie par Pompage) dont les capacités d’extension sont limitées en France, voire inexistantes au regard des besoins. Pendant les heures creuses, des pompes transfèrent l’eau d’un barrage en aval vers un barrage en amont. Les autres formes étudiées, notamment le stockage par batteries, ont des coûts excessifs. Or, EDF produit le kWh à moins de 5 centimes d’euro…
- le besoin en lignes supplémentaires pour « accueillir » les énergies renouvelables est estimé à 20.000 (vingt mille) km en Europe d’ici 2020 (p 79). Outre un financement (5,5 Md€ pour la France) « qui repose sur les consommateurs », elles « se heurtent à des difficultés d’acceptabilité sociale ».
A l’issue de l’analyse, la Cour récapitule le surcoût, essentiellement sous formes de taxes et d’impôts, qualifiés pudiquement de » Politique de soutien » aux énergies renouvelables :
- CSPE 2005 / 2011: 14,3 Md€ (Pages 94 et 121).
- CSPE 2012 à 2020 (programmes en cours et objectifs du gouvernement) 40,5 Md€ (P 121)
- Adaptation du réseau à la dispersion des 285 000 producteurs privés 5,5 Md€ (P 122)
Coût fiscal :
a) dépense fiscale brute attachée aux ENR (2005/2011) 1,8 Md€ (P 44).
b) Crédit d’impôt Développement Durable (CIDD) 2005/2011) 8 Md€ (P45).
TOTAL : 70,1 Md€ !
Il faut noter :
- que le coût fiscal pour la période 2011 à 2020 ne sera pris en compte qu’après avoir été constaté en 2020. Il s’ajoutera aux 70,1 Md€.
- que la loi NOME (Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité) de décembre 2010 impose à EDF de livrer à bas prix (42 €/MWh) 25% de sa production nucléaire à ses concurrents. Le plus important d’entre eux, GDF/SUEZ, achète donc son électricité à 42 €/MWh …….et vend à EDF son électricité photovoltaïque à 310 €/MWh grâce à « l’obligation d’achat ». La loi NOME est une machine infernale qui ponctionne la production d’électricité nucléaire d’EDF pour alimenter ses concurrents… sur le dos des consommateurs et des contribuables qui paient la différence.
En effet, EDF avance seulement l’argent pour acheter cette électricité « renouvelable » à ses concurrents et aux particuliers puis elle se fait rembourser par l’état grâce à « l’impôt » CSPE… sur la facture des clients.
Or, quand cette CSPE est volontairement sous estimée pour des raisons électorales, comme ces dernières années, l’État rembourse sur nos impôts l’avance financière qu’EDF a dû consentir pour acheter la production d’électricité des renouvelables au prix fort. Ce sont les 4,9 Md€ que le gouvernement a remboursés a EDF en janvier 2013.
Conclusions et recommandations:
Le CGSP constate dans son rapport de janvier 2014 que « le paquet climat-énergie ne répond plus aux objectifs initiaux : ni la sécurité d’approvisionnement, ni la préservation de la compétitivité, ni enfin la maitrise des émissions de gaz à effet de serre (GES) ne sont assurées ».
Il recommande de « considérer l’objectif de diminution des émissions de GES comme le principal, sinon l’unique objectif à l’horizon 2020 et de reconsidérer les politiques de soutien aux énergies renouvelables ».
La Cour des comptes conclut et propose des « recommandations » (p 83 et 84), en particulier un dispositif de contrôle efficace, notamment dans les filières solaires et biomasse et pose la question : « A qui faire supporter la CSPE ? » c’est à dire le surcoût de 40,5 Md€ (p 95). Elle propose de réfléchir à « un élargissement de l’assiette de financement intégrant la consommation des énergies fossiles » (p 92).
Pauvre contribuable et consommateur. Ainsi, le surcoût faramineux de dizaines de milliards d’euros de la production d’électricité renouvelable (hors hydraulique) sera dilué dans tous nos achats d’énergies (essence, gaz, fioul, électricité,…). Il sera ainsi moins visible et cette gabegie scientifiquement organisée pour satisfaire un objectif idéologique « vert » et décroissant contribuera à appauvrir en douceur les Français de manière légale et « indolore ».
- février 2011, rapport de la Cour des comptes » La compensation des charges du service public de l’électricité »
- http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/Les-couts-de-la-filiere-electro-nucleaire
- http://www.ccomptes.fr/Publications/Publications/La-politique-de-developpement-des-energies-renouvelables
- La perversion est dans l’utilisation du mot Public alors qu’il s’agit de faire financer la production principalement Privée de l’électricité renouvelable.
- Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles