Pas de langue de bois et du pragmatisme. Reed Hastings, le patron de Netflix, parle pour la première fois de l’arrivée en France de son service de SVoD. Interviewé par Télérama, il n’a éludé presque aucune question. A commencer par sa concurrence avec des médias comme Canal plus. Morceaux choisis.
La fin de la télévision
Première mise au point, il affirme continuer à travailler en bonne entente avec le groupe audiovisuel français. « Nous diffusons leurs séries aux Etats-Unis, ils achètent les nôtres, comme House of Cards, pour la France », rappelle-t-il. Plus surprenant, on apprend qu’il a invité à dîner le DG de la chaîne, Rodolphe Belmer, à Paris pour lui annoncer le lancement de Netflix en France et qu’il entretient des relations très cordiales avec lui (tout comme il conserverait également de bons rapports avec Gaumont). Cependant, il confirme que la concurrence avec Canal va être rude.
Concernant l’avenir des chaînes de télévision françaises, Reed Hasting n’a aucun état d’âme : « La télévision linéaire va encore durer un peu grâce au sport, dont la fin n'est jamais écrite. Mais elle aura disparu dans vingt ans, car tout sera disponible sur internet ». Ce qui ne signifie pas pour autant la disparition de ses acteurs. Ils seront juste condamnés à évoluer et se recentrer sur le web. « Canal+ deviendra aussi un média sur internet. Souvenez-vous : ils ont commencé par la diffusion hertzienne, se sont ensuite étendus au câble, au satellite puis à l'ADSL. La prochaine étape, c'est le web », ajoute-t-il.
Netflix en discussions avec Orange, SFR et Free
Reed Hastings reconnaît être en discussions avec des opérateurs afin que Netflix soit distribué sur des box françaises. Mais il semble vouloir privilégier un seul d'entre eux. « Nous discutons avec Orange, SFR ou Free. Tout dépendra des conditions financières », annonce-t-il.
Comme à son habitude, la patrond de Netflix a refusé de communiquer le nombre d'oeuvres disponibles en septembre. Le service et le catalogue seront amenés à évoluer rapidement suivant les habitudes de consommation des Français analysés grâce à de savants algorithmes.
La France, un marché comme les autres
La décision définitive de se lancer en France n’aurait été prise qu’au mois de décembre dernier. Et pour deux raisons : « L'Internet haut débit (ADSL), qui est le mode principal de diffusion de Netflix, est très développé chez vous. Et les Français apprécient beaucoup les films et séries… », détaille-t-il très simplement.
Il est d'ailleurs toujours question de produire des séries au niveau national. « La première sera une série politique, tournée à Marseille. Nous sommes encore en négociation avec le producteur. Elle sera diffusée sur Netflix dans un an, si tout va bien ».
Il n'aurait jamais fait mystère de son refus d'installer un siège social dans notre pays, notamment lors de sa rencontre au mois de janvier 2014 avec Fleur Pellerin, alors ministre déléguée au Numérique. Un moyen d'échapper à notre legislation contraignante mais pas à la TVA qu'il reversera bien à la France depuis la Hollande.
L'évocation de la fameuse « chronologie des médias », qui devrait pénaliser Netflix en l'empêchant de diffuser des longs métrages récents, le laisse de marbre. « La chronologie des médias n'est pas un problème car nous diffusons surtout des séries, qui ne sont pas soumises à cette réglementation », avance-t-il.
Enfin, l’ego des Français risque d’en prendre un coup. Notre Nation qui se vit comme la patrie des arts et des lettres est « un marché qui ressemble à beaucoup d’autres » pour Hastings. Le dernier film français qu’il ait vu ? Intouchables, il y a plus d’un an. Ses films et artistes français préférés ? Il est incapable d’en citer un, avouant regarder principalement des œuvres américaines. Un manque de curiosité décevant pour le patron du plus gros service de SVoD au monde.